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Leïla Sebbar, entre l'Algérie et Paris



Pendant plus d'une heure, Leïla Sebbar a pu explorer, avec Valérie Susset, les souvenirs de son père. Un père avec qui elle a entretenu une relation au centre de son nouveau roman Lettre à mon père. Mais l'autrice a aussi pu parler de l'Algérie, de son arrivée en France et de l'écriture de ses romans.

 

"Si j'avais appris l'arabe, je n'aurais pas été écrivaine mais ce n'était pas mon destin." Née d'un père algérien et d'une mère française, Leïla Sebbar a toujours vécu sur une ligne de crête entre ses deux origines. "Je crois avoir une acuité de regard que n'ont pas les hommes, et en particulier les hommes arabes. En ayant un parent de chaque côté, j'ai parfois vécu dans une accusation permanente, ça m'a rendue très aiguisée, très agressive aussi." Son nouveau livre Lettre à mon père n'est malgré tout pas son idée. C'est celle de son éditeur qui lui a proposé de travailler dessus pendant le confinement, avoue-t-elle. Mais une bonne idée "J'ai eu plaisir à écrire cette lettre, ce dialogue. C'est un plaisir de vérité J'ai pu lui dire tout ce que j'avais envie de dire en toute sincérité."

Très proche de son père, elle décrit comment il l'a formée entre secret et éducation "Mon père nous a transmis cette arme qu'est le savoir. Mais à côté de cela, il gardait des choses cachées, comme sa foi musulmane. Je ne l'ai jamais vu prier", s'exclame l'écrivaine. "Sur certains sujets, je lui disais : je ne sais rien parce que tu ne me l'a pas dit."

Ses récits, "tissés de façon très serrée entre son imaginaire et sa réalité", comme les décrit Valérie Susset, lui permettent "de se mettre à l'abri." Ils gardent avec elle des souvenirs, mais aussi beaucoup d'images. Parmi ces images, on retrouve sa collection de cartes postales de l'Algérie. Une collection décriée par beaucoup, y compris son père, qui n'y voyait que "l'expression d'un faux folklore qui n'existait pas." Mais elle la défend envers et contre tout. "Mon regard sur ces cartes postales est critiqué mais je l'assume. La critique de l'orientalisme est un regard attendu qui ne m'intéresse pas. Moi, je trouve ça idéologique et sectaire. Moi, j'ai un autre regard !"