Matthieu Noucher

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Matthieu Noucher est géographe, chargé de recherche au CNRS au sein du laboratoire PASSAGES (Bordeaux) et directeur-adjoint du réseau français de recherche en science de l’information géographique (GdR MAGIS). Ses recherches portent sur la dimension politique et sociale des usages de la cartographie numérique. Il a notamment publié « Les petites cartes du Web » (Ed. rue d’Ulm, 2017) et co-dirigé l’« Atlas critique de la Guyane » (Éd. CNRS, 2020). Ses travaux actuels se focalisent sur le « blanc des cartes », ces marges territoriales qui, à bien des égards, peuvent aussi être considérées comme des marges cartographiques.

 

Bibliographie sélective

les petites cartes du web

« Les Petites Cartes du Web. Approche critique des nouvelles fabriques cartographiques »
aux éditions Rue d'Ulm, Presses de l'École normale supérieure

 

Depuis l’apparition de Google Maps il y a 10 ans, la cartographie a considérablement évolué. Les mutations technologiques et les changements d’usages conduisent à une profusion de données géographiques. À l’origine de ces milliers de cartes, des professionnels – géographes, cartographes... mais aussi des utilisateurs nouveaux : militants associatifs, acteurs politiques, hackers, etc. Désormais, sur le web, les cartes sont donc partout. Comment interpréter cet essor et cette omniprésence ? En prenant ces nouveaux usages au sérieux ! Ainsi, le parti pris de ce livre est de faire des Petites Cartes du web un véritable objet de recherche en mobilisant la cartographie critique comme cadre théorique et en défendant une méthode d'analyse ancrée à la fois dans les infrastructures techniques et auprès des acteurs impliqués. Deux études de cas menées en Guyane – sur les activités minières et sur les toponymes amérindiens – viennent illustrer ces propositions et démêler les usages et enjeux des cartes et contre-cartes guyanaises qui circulent sur Internet. Les cartes officielles de l'État sont ici complétées, contournées, voire concurrencées par celles des communautés issues de la culture libre ou des multinationales de l'Internet mais aussi des opérateurs miniers, des associations de défense de l'environnement ou encore des représentants des peuples autochtones.
Finalement, en déployant une approche critique, ce petit ouvrage de synthèse déconstruit ces nouvelles façons de lire et d’écrire l’espace, qui font renaître le mythe de l’objectivité des cartes et de leur pouvoir de changer le monde. Il est destiné aux chercheurs, enseignants et étudiants en géographie, géomatique et sciences de l’information et de la communication qui s’intéressent aux nouvelles formes d’écritures géographiques et à leurs enjeux sociopolitiques. Il vise aussi un public large intéressé par la cartographie, la géographie et les humanités numériques

 

atlas critique de la guyane

« Atlas Critique de la Guyane »
aux éditions CNRS

 

La carte n’est pas le territoire. Œuvre de l’esprit, interprétation de l’espace, elle est restée longtemps l’apanage du pouvoir, l’expression des dominants, véhiculant des représentations partiales, douteuses ou orientées. Une mise en ordre qui fabrique parfois l’ordre bien réel de nos sociétés. Dressé dans les années 1970, ce constat critique bouleverse encore aujourd’hui la lecture des cartes. Cet atlas s’inscrit dans ce mouvement intellectuel en plein essor : il se veut être un exercice de cartographie critique appliquée à un espace donné. Les auteurs, géographes spécialistes de la discipline, ont choisi la Guyane – mais leur méthode pourrait s’appliquer à n’importe quel « terrain » – parce qu’elle forme un espace singulier, une « île » méconnue, rebelle aux méthodes classiques de représentation (par l’immensité du massif amazonien, difficilement accessible). Région à forts enjeux politiques et économiques, ses cartes voient s’affronter des visions très différentes, des divergences de regards sur l’Histoire.

Cet ouvrage questionne des cartes existantes en procédant à une analyse virtuose de tous les grands problèmes de leur fabrique (confiner, délimiter, détecter, collecter, nommer) à leur usage (mesurer, planifier, révéler, figer, relier). Il traite aussi des thèmes cruciaux de cet espace en produisant pour ce faire des cartes originales sur les frontières, le littoral, la forêt, les circulations, l’orpaillage, la toponymie, la topographie, le foncier, l’urbanisme, les relations géopolitiques, la biodiversité… Tandis que les deux derniers chapitres « Imaginer, la Guyane par les cartes » et « Oublier, le blanc des cartes » réinterrogent la carte jusque dans la logique de ses suppositions ou de ses omissions.
En multipliant les points de vue, cet atlas fait émerger les co-vérités d’un territoire, divers, complexe à décrire, sans jamais pouvoir y arriver complètement, comme s’il y avait pour cette « île » et le monde en général une impossibilité, un « in-cartographiable » irréductible.