Mia Couto

marie lescroart 

Président du Salon du Livre 2022


Fils du poète portugais Fernando Couto, Mia Couto est né au Mozambique en 1955. Après avoir étudié la médecine et la biologie, il s’engage aux côtés du FRELIMO en faveur de l’indépendance du pays, devient journaliste puis écrivain. Il travaille actuellement comme biologiste, spécialiste des zones côtières, et enseigne l’écologie à l’université de Maputo. Pour Henning Mankell, « il est aujourd’hui l’un des auteurs les plus intéressants et les plus importants d’Afrique ». Ses romans sont traduits dans plus de 30 pays.

Il a reçu de nombreux prix pour son œuvre, dont le Prix de la francophonie en 2012, le prix Camões en 2013, le prix Neustadt 2014 (Allemagne), il a également été finaliste de l’Impac Dublin Literary Award et du Man Booker Prize en 2015. Il a reçu en 2020 le prix Jan Michalski couronnant chaque année une oeuvre de la littérature mondiale.

Photo : © Philippe Matsas 2011

 

Bibliographie sélective 

la grande barriere de corail

« Le Cartographe des absences »
aux éditions Métailié - En librairie le 2 septembre 2022
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

En 2019, un cyclone a entièrement détruit la ville de Beira sur la côte du Mozambique. Un poète est invité par l’université de la ville quelques jours avant la catastrophe. Il retrouve son enfance et son adolescence dans ces rues où il a vécu dans les années 70. Il va faire un voyage « vers le centre de son âme » et y trouver son père, un grand poète engagé dans la lutte contre la colonisation portugaise. Il se souvient des voyages sur le lieu de terribles massacres perpétrés par les troupes coloniales. Il se souvient aussi de Benedito, le petit serviteur, aujourd’hui dirigeant du FRELIMO au pouvoir, de l’inspecteur de la police politique, des amoureux qui se sont suicidés parce que leur différence de couleur de peau était inacceptable, de la puissante Maniara, sorcière et photographe, et surtout de Sandro, son frère caché.

Les faits que l’enfant qu’il fut nous raconte sont terribles, le racisme, la bêtise coloniale, la police politique, la PIDE, les traîtrises. Ce roman au souffle puissant peuplé de personnages extraordinaires à l’intrigue aussi rigoureuse que surprenante est écrit comme la poésie, que Mia Couto définit comme « une façon de regarder le monde et de comprendre ce qui habite une dimension invisible de ce qu’on nomme la réalité. Sans cette dimension poétique il est impossible de comprendre la vie ». Un roman magnifique, dans l’ombre d’un cataclysme, le plus personnel écrit par l’auteur, l’un de ses meilleurs.

 

la grande barriere de corail

« Les Sables de l'empereur »
aux éditions Métailié - Prix Jan Michalski - 2020
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

À la fin du XIXe siècle, le Mozambique est ravagé par les guerres entre les clans et contre les colonisateurs. Germano, un soldat portugais exilé sans espoir de retour parce que républicain, et Imani, une jeune Africaine, trop belle et trop intelligente, son interprète, sont le fil rouge de ce roman où ils évoluent parmi des personnages historiques bien réels, comme l’empereur africain Ngungunyane et le flamboyant Mouzinho de Albuquerque, “pacificateur” du Mozambique. Germano découvre l’Afrique de l’Est en prenant son poste dans un village perdu où il fait la connaissance d’Imani. Dans ses rapports, Germano raconte les transformations de la région avec en toile de fond l’affrontement entre la monarchie coloniale et Ngungunyane. Imani décrit l’avancée de la colonisation, les structures familiales, les traditions qui cherchent à subsister, les migrations. Elle s’aperçoit aussi que sa maîtrise du portugais la sépare de ses voisins, tandis que les Portugais la considèrent comme une espionne. Liés par un amour ambigu, Imani et Germano partent sur le fleuve dans une itinérance chaotique et aventureuse qui les confronte à la réalité de cette guerre et à des personnages fabuleux.

Mia Couto, romancier dans un pays où l’oralité règne, décrit ces trajectoires d’une écriture concise et puissamment évocatrice. Il écrit ainsi un grand texte sur l’incompréhension et la construction de la peur de l’autre.

 

la grande barriere de corail

« La pluie ébahie »
aux éditions Chandeigne
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

À Senaller, un village dont on ne peut que partir, la pluie ne tombe plus, elle demeure en suspens. Le fleuve est à sec, la sécheresse menace. Le village est-il la proie d’un châtiment divin ou des rejets de l’usine installée à proximité ? Devant l’impuissance des commandeurs des nuages et des villageois, la mère du narrateur décide de se rendre à l’usine... Devenu le complice malgré lui d’un terrible secret, l’enfant n’a pas d’autre choix que de protéger sa mère de la fureur paternelle. La présence aimante du grand-père est l’unique refuge de l’enfant. Afin que la pluie tombe à nouveau, la famille devra dérouler les fils de son histoire et revivre la légende des Ntoweni.

 

 

 

 

 

la grande barriere de corail

« L'accordeur de silences »
aux éditions Métailié - Prix littéraire de l’AFD - 2012
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

« La première fois que j’ai vu une femme j’avais onze ans et je me suis trouvé soudainement si désarmé que j’ai fondu en larmes. Je vivais dans un désert habité uniquement par cinq hommes. Mon père avait donné un nom à ce coin perdu : Jésusalem. C’était cette terre-là où Jésus devrait se décrucifier. Et point, final. Mon vieux, Silvestre Vitalício, nous avait expliqué que c’en était fini du monde et que nous étions les derniers survivants. Après l’horizon ne figuraient plus que des territoires sans vie qu’il appelait vaguement “l’Autre-Côté”. »

Dans la réserve de chasse isolée, au cœur d’un Mozambique dévasté par les guerres, le monde de Mwanito, l’accordeur de silences, né pour se taire, va voler en éclats avec l’arrivée d’une femme inconnue qui mettra Silvestre, le maître de ce monde désolé, en face de sa culpabilité.

Mia Couto, admirateur du Brésilien Guimarães Rosa, tire de la langue du Mozambique, belle, tragique, drôle, énigmatique, tout son pouvoir de création d’un univers littéraire plein d’invention, de poésie et d’ironie.

 

 

la grande barriere de corail

« Le fil des missangas »
aux éditions Chandeigne
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

De vibrants portraits de femmes aux prises avec leurs désirs, leurs amours déçues et leurs blessures assassines, des êtres qui réinventent le réel, des enfants qui revisitent leurs rêves : telles sont les perles de verre (missangas) qui composent cette œuvre où Mia Couto invente un univers singulier et un langage unique, africain, et universel. Mêlant harmonieusement registres littéraires et populaires, jeux de mots et mots-valises, ces nouvelles lapidaires tantôt cruelles, tantôt drolatiques, incarnent ici l’art du conte porté à sa perfection.

 

 

 

 

 

 

« Tombe tombe au fond de l'eau »
aux éditions Chandeigne
Traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues

Au Mozambique, au bord de l’océan indien: Zeca Perpétuo, un ancien pêcheur, n’a d’yeux que pour sa voisine, Dona Luarmina qui passe le plus clair de son temps à effeuiller des fleurs invisibles. Leurs rencontres, à la fois cocasses et poignantes, empruntent souvent des voies étranges. Ils en viennent à délivrer de lourds secrets. Iront-ils jusqu’au bout de leur dialogue alors que leur existence, déjà précaire, sombre inexorablement ?

 

 

 

 

 

 

 

le chat et le noir

« Le chat et le noir »
aux éditions Chandeigne
Traduit par Diogo Quintela, Bernard Tissier

« Il paraît qu'il acquit cette apparence, en totalité noire, à la suite d'une frayeur. Je vais vous conter ici comment eut lieu ce passage du clair à l'obscur. Le cas, je vous en avertis, n'est pas clair du tout ». Ce il est un petit chat qui, désobéissant à sa mère, va dépasser la limite entre lumière et obscurité malgré sa peur du noir. Un chat ayant peur du noir ? Voilà qui est curieux ... mais ce petit chat est chacun de nous, avec nos craintes face à l'obscurité et aux côtés sombres ou inconnus de la vie.

Riche d'une langue inventive, souvent drôle, ce texte enchante les enfants et séduit les adultes. Son auteur, Mia Couto, déjà connu en France, est aujourd'hui un des auteurs majeurs ; le peintre Stanislas Bouvier, transpose dans un livre son univers teinté d'onirisme et de mystère.